Les pleurants de Bourgogne à Cluny : attention, chef d’œuvre !

Posté par sourcesmedievales le 27 février 2013

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« Les pleurants des tombeaux des ducs de Bourgogne sont des œuvres d’art profondément touchantes. Au-delà de leurs évidentes qualités visuelles et narratives, nous ne pouvons pas nous empêcher d’être emplis de l’émotion qu’ils expriment au travers de leur procession funéraire, pleurant, priant, chantant, perdus dans leurs pensées, donnant libre cours à leur chagrin, ou consolant leur voisin. Le deuil, comme ils nous le rappellent, est une expérience collective, commune à tous les peuples et à toutes les époques. »

Sophie Jugie, Directrice du Musée des Beaux-Arts de Dijon


Comme de coutume, l’invitation au vernissage du Musée national du Moyen Âge ce 26 février 2013 méritait réponse et donc visite pour cet événement unique : le retour en terre de France des pleurants du tombeau de Jean Ier de Bourgogne (1371-1419), dit Jean sans Peur, duc de Bourgogne, comte de Flandres, d’Artois et de Charolais… pour ces principaux titres. Pourquoi « retour » ? Cela demande une petite explication sur le parcours de l’œuvre ces trois dernières années avant de l’aborder plus longuement.

En 2010, les salles médiévales du Musée des Beaux-arts de Dijon ont été fermées pour une large rénovation. Les 39 figures en albâtre, les « pleurants » du tombeau ducal, conservées dans une des salles, la salle des Gardes, ont été désolidarisées du tombeau et sont donc parties en tournée internationale aux États-Unis – notamment au Métropolitan Museum of Art de New-York – tournée de deux ans outre-Atlantique où elles ont été vues par plus de 600.000 personnes.

Leur retour récent sur le vieux continent a connu trois étapes ; le musée de l’Hôpital Saint-Jean de Bruges en Belgique, le Bode Museum de Berlin en Allemagne et, in fine, le musée de Cluny, avant un retour dans les salles rénovées dijonnaises à la fin de l’été 2013.

Qui sont les pleurants ? De grande renommée, l’ensemble est mal connu par le grand public, car peu montré. Les pleurants du tombeau de Jean sans Peur sont pourtant des chefs-d’œuvre de la sculpture bourguignonne du XVe siècle. Ils proviennent du tombeau monumental du duc de Bourgogne et de son épouse Marguerite de Bavière (1363-1423). L’histoire dit que ce fut une commande de leur fils, Philippe III Le Bon (1396-1467), s’inspirant des sculptures précédemment réalisés par Claus Sluter et son équipe au sein de l’atelier ducal pour le tombeau de son grand-père, Philippe le Hardi (1342-1404). En 1443, deux sculpteurs sont sollicités. Jean de la Huerta (1413-1462) qui se consacre à l’ouvrage jusqu’en 1456, réalisant la galerie du tombeau, les pleurants en pierre d’albâtre, les anges de la dalle et le heaume du duc de Bourgogne. Son successeur, Antoine le Moiturier (1425-1480), sculpte les gisants de 1446 à 1449, puis achève les pleurants et l’arcature du tombeau. L’ensemble achevé, il est difficile aujourd’hui de dire qui a sculpté quoi sur les 39 pleurants composant le tombeau dans lesquels on retrouve deux enfants de cœur, le clergé dont un évêque, des chartreux, puis des deuillants appartenant à la famille et à la maison du duc. Le travail de sculpture est exceptionnel, pour des statuettes d’environ 40 centimètres de haut, mais la mise en valeur fut souvent occultée par leur présentation dans le soubassement du tombeau de Jean sans Peur.

Restait donc à inventer une mise en scène exceptionnelle, une scénographie muséale originale pour mettre en valeur les pleurants, les effets de drapé avec remous de plis et, dans la mesure du possible, le cortège dans son entier. L’idée d’installer les pleurants dans une procession funèbre, et non de poser sur un site des statues individuelles comme ce fut le cas dans certains lieux d’expositions, a donc pris le pas, afin de rehausser à la fois le travail de la pierre et la symbolique de l’objet. Libérés de l’arcature du tombeau, les pleurants ont dès lors participé à la construction de l’événement et ont été intégrés dans une exposition propre aux scénographes retenus par Cluny, scénographes qui avaient déjà notamment commis l’exposition sur la Croatie médiévale et l’événement Hopper 2012-2013 au Grand Palais.

Rassemblés dans une salle unique, cachés du visiteur lors de son entrée dans le lieu par un mur ajouré, les 39 pleurants se découvrent ensemble et se succèdent en un semblant de cercle, sur un podium incliné, dépouillés de tout cartel ou d’accompagnement secondaire, dans un demi-éclairage. 39 figures de larmes d’albâtre enveloppées dans leurs manteaux, profondément touchantes et exprimant de diverses manières l’intensité dramatique des émotions face à la mort. Un moment fort qui ne laisse pas indifférent le visiteur, une exposition – au sens littéral – de grande qualité… Attention, chef d’œuvre !

L’exposition est présentée du 27 février au 3 juin 2013 au Musée de Cluny – musée national du Moyen Âge, du mercredi au lundi, de 9h15 à 17h45.

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Ce soir, j’ai rencontré Jehan Le Brave, gentilhomme du XIVe siècle…

Posté par sourcesmedievales le 15 janvier 2013

Ce soir, j’ai rencontré Jehan Le Brave, gentilhomme du XIVe siècle… dans Actualités jehan-273x300La rumeur courait depuis quelques semaines et plusieurs geeks, influenceurs et influencés, y avaient fait allusion dans des tweets tardifs et discrets. Les médias sociaux abritent parfois des personnages improbables, le web 2.0 est propice à beaucoup d’excentricités, mais le réseau social Twitter bougeait depuis peu les lignes avec un curieux personnage, présent quotidiennement par ses gazouillis, lu avidement par des milliers de followers, un certain Jehan Le Brave (@jehanlb).

Le côté étrange du personnage de Jehan Le Brave ? Probablement sa présence dans ce XXIe siècle connecté et numérique. Se présentant comme le « Dauphin de France » habitant « Lutèce La bel », l’homme prévient de sa présence à titre personnel sur Twitter : « Twytts miens n’ensgagent que le Roy » [sic]. Et c’est peut-être là que la situation dérape pour le geek contemporain. Jehan Le Brave ne s’exprime en effet qu’en vieux français dans ses tweets, un vieux français parfois mâtiné d’Oïl et d’Oc, un vieux français que l’on déchiffre parfois avec peine. Depuis son arrivée sur Twitter, que ce soit par ses commentaires, ses souvenirs d’un Moyen Âge qu’il connaît mieux que le vulgare pecus du XXIe siècle, ou ses réponses et DM (message direct) – quand il répond -, le personnage ne pratique qu’une langue bien ancienne en 140 caractères. Son avatar (ci-dessus) confirme son époque, dont l’origine se trouve dans les confidentielles collections du Musée de l’Hospice Comtesse de Lille. Il s’agit d’une peinture, d’un auteur anonyme semble-t-il, de Jean Ier de Bourgogne, alors qu’il était duc de Bourgogne. Et on en sait guère plus.

Quand Jehan le Brave a souhaité me rencontrer, curieux de l’#avisduMédiéviste, la date a été rapidement prise et le rendez-vous fixé – dans une taverne d’une rue sombre parisienne, comme le lecteur peut s’y attendre. Et ce soir-là, j’ai rencontré Jehan le Brave, gentilhomme du XIVe siècle finissant, quelque peu égaré dans ce XXIe siècle naissant, mais ô combien perspicace et précis dans son regard sur notre monde contemporain. Un Jehan décomplexé par la technologie, amusé par le métro – qu’il a pourtant vertement décrit dans ses tweets – , intéressé par le « télétravayl » [sic] qu’il « envisageois vecques grand serieulx » [sic], mais surtout intrigué par l’actualité people de Paris. Un Jehan férocement « de Lutèce », buvant sec – bières comme alcools forts –, peu enclin à s’étaler sur ce présent qu’il perçoit mal, mais ravi et enchanter de rencontrer un « biau compagnon de taverne vecques l’ont refois le monde mésdiéval » [re-sic]. Une rencontre des plus improbables qui s’est finie tard dans la nuit froide, Jehan me confiant reprendre un « destrier » pour retourner dans ses quartiers. On se l’est promis ; notre prochaine rencontre se fera dans un lieu plus culturel, un musée, celui du Moyen Âge de Cluny, pour que Jehan me raconte son siècle.

 

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